La 5G pourrait aussi avoir un rôle d’accélérateur pour le monde de la recherche clinique

Cap Digital
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6 min readMar 13, 2023

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Le parcours du patient ne commence pas à la mise sur le marché du médicament, il commence dès les essais cliniques. En quoi la 5G représente-t-elle une nouvelle étape majeure pour la recherche médicale ? Réponse avec Hervé de Belenet, Global Manager dans les secteurs de la santé et du social chez Inetum, entreprise de services numériques adhérente Cap Digital depuis plusieurs années.

Hervé de Belenet, Global manager secteur santé social

En quoi les nouvelles technologies et la digitalisation des services de santé peuvent-elles révolutionner la façon dont nous menons les essais cliniques ?

Pour résumer l’impact de technologies telles que l’IoT, l’IA et le big data sur le monde de la recherche clinique, il faut s’attarder sur trois axes d’évolution de la recherche : l’optimisation de la gestion des cohortes (alias la population de personnes suivies dans le temps), la mise en place de nouveaux design d’études et la décentralisation des essais.

Par exemple, grâce à l’intelligence artificielle, on peut envisager une meilleure constitution et gestion des cohortes pour exécuter le protocole en vigueur d’un essai clinique de façon pertinente. L’IA va permettre de traiter un gros volume de données et d’identifier rapidement, à partir de bases de données de patients, les profils recherchés. Et quand on sait que beaucoup de projets de recherche échouent à cause de difficultés à trouver les bons patients, ce n’est pas anodin. Toujours à travers l’IA et le big data, on peut aussi imaginer dans un futur plus ou moins proche le déploiement de nouveaux design d’études, comme les bras virtuels et synthétiques, pour permettre un jour le recueil de données en vie réelle, soit la possibilité de sortir de la logique de cohorte et de collecter des données hors cadre expérimental, générées pour la plupart à l’occasion des soins de routine d’un patient, et qui reflètent donc a priori la pratique courante. Quant à l’IoT, on devrait voir se multiplier dans les prochaines années des protocoles en partie ou totalement gérés à distance, notamment en ce qui concerne le suivi des constantes des patients. C’est ce qu’on appelle la décentralisation des essais.

Quel impact cette digitalisation des essais cliniques peut-elle avoir sur les patients et les professionnels de santé ?

Ce mouvement vers une santé plus numérique et innovante, dès les essais cliniques, pourrait avoir plusieurs bénéfices pour tous les acteurs concernés, et donner des perspectives à tous. Pour le patient, avoir accès à des essais décentralisés, c’est la garantie d’un suivi simplifié et d’un gain de temps, de confort et d’énergie. On réduirait probablement le nombre d’arrêts d’essais liés au découragement et à l’épuisement du patient dans la durée, souvent liés aux déplacements et au stress du suivi. Côté promoteurs (académiques et/ou acteurs privés), cette digitalisation est synonyme d’optimisation des coûts, souvent très élevés sur la partie monitoring, et leur donnerait aussi la possibilité de recruter plus de patients et de mener plus de projets. Et pour les investigateurs d’essais cliniques (hôpitaux, professionnels de santé etc.), qui je le rappelle facturent le promoteur pour coordonner et suivre l’essai clinique, ce serait l’occasion d’augmenter ses capacités d’investigation en multipliant les projets de recherche innovants, et renforcer par la même occasion son attractivité.

En somme, améliorer les projets de recherche en s’aidant des nouvelles technologies, c’est créer de la valeur ajoutée sur toute la chaîne de valeur d’un essai clinique, et in fine, continuer à faire de la France un pays moteur — et parfois leader, comme pour la recherche en oncologie — en termes de recherche clinique.

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En parlant de la France : en quoi les projets de recherche clinique représentent-ils un enjeu stratégique ?

C’est à la fois un enjeu de pure recherche clinique mais aussi un enjeu économique. Il faut savoir que la zone Europe, au niveau mondial, est en 3ème position dans le domaine après l’Asie et les Etats-Unis, avec comme pays clés la France, l’Angleterre et l’Espagne, qui ont chacun leurs spécificités. Être à la pointe de la recherche clinique, c’est démontrer l’excellence du pays en matière de recherche, et donc un enjeu de compétitivité internationale de premier ordre. C’est pourquoi l’Europe se mobilise depuis plusieurs années pour donner un cadre commun à tous les pays membres, notamment avec l’entrée en vigueur de nouveaux règlements européens (dispositifs médicaux en 2021, recherche sur les médicaments en 2022) afin d’harmoniser les processus. Pour cela, l’UE a mis en place très récemment un portail et une base de données centralisés : le CTIS.

Vient alors la question de l’arrivée de la 5G : en quoi est-elle d’après vous déterminante pour l’amélioration de cette connaissance scientifique ?

D’après moi, la 5G, en tenant ses trois promesses — haut débit, faible latence et capacité de supporter un nombre important d’objets connectés — aura un rôle d’accélérateur en matière de recherche clinique. On le constate déjà dans d’autres pays à travers le monde, comme la Corée du Sud, où la 5G stand alone est déjà là, et les retours d’expérience sur ce caractère accélérateur de la recherche, positifs. Nous attendons, donc, son déploiement sur tout le territoire français avec impatience, qui permettra aussi de faire évoluer les parcours de soins, de développer la télémédecine ou encore la téléchirurgie.

Quels défis reste-t-il à relever pour que le déploiement de la 5G au service de la digitalisation des essais cliniques se fasse dans les meilleures conditions ?

Au-delà des questions purement techniques — déploiement d’une 5G stand alone opérationnelle et couverture maximale sur tout le territoire, zones blanches comprises — et réglementaires, il est important de rappeler que cela ne se fera pas du jour au lendemain aux niveaux culturel et organisationnel. Aujourd’hui, le traitement décentralisé des essais cliniques grâce à la 5G n’est encore qu’une idée à peine expérimentée. Si la 5G stand alone arrive sur nos territoires dans les prochains mois, cela ne suffira pas, il faudra aussi réaliser tout un travail d’acculturation des professionnels de santé et patients, et anticiper la capacité des différentes parties prenantes d’un essai clinique à prendre en compte cette nouvelle dimension technologique dans les protocoles, notamment au niveau logistique : quid de l’installation et de la maintenance des objets connectés chez le patient, quelles modalités de monitoring, quelles procédures de travail etc. Il faudra donc du temps pour tout le monde avant que cela soit véritablement effectif. Ce n’est pas parce que la 5G sera opérationnelle que toute la recherche clinique travaillera tout de suite différemment.

Il est donc primordial dès aujourd’hui de multiplier les expérimentations de projets de recherche innovants, et de déployer demain des projets phare qui serviront de ballons d’essais pour faire avancer le monde de la recherche de concert avec la technologie.

À propos d’Inetum dans le monde de la santé

Inetum est une société de services et de solutions digitales, et un groupe international qui aide les entreprises et institutions à tirer le meilleur du digital flow. Inetum, acteur de la transformation digitale du secteur sanitaire, social et médico-social, propose des offres de services (HDS, Cyber sécurité, Outsourcing, Innovation & IOT, …) et des offres d’intégration et d’édition de solutions métier, notamment dans le domaine de la convergence des SI hospitaliers, de l’aide médicale d’urgence, de la gestion des projets de recherche clinique, et de la gestion des parcours de soins et des parcours de santé.

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